16 mars 2011

Durango - Hommage, pompage ou remontage ?

Jean Louis "Durango" Trintignan
Durango est une série que je relis toujours avec plaisir et bien plus fréquemment que d'autres bons westerns comme Blueberry, Comanche ou Jerry Spring.  


Le visionnage récent du Grand Silence, western spaghetti trop cuit mais pas sans atouts, m'a néanmoins poussé à m'interroger sur l'apport créatif réel d'Yves Swolf. 
En effet, le premier tome de sa série, Les chiens meurent en hiver, est un hommage appuyé au film réalisé dix ans plus tôt par Sergio Corbucci : scénario, situations, décors, costumes, ...  tout y passe. Durango a même les traits de Jean Louis Trintignan, héros du film, alors que son ennemi d'un tome est sans nul doute inspiré par Klaus Kinski, méchant du film. On frise la photocopie. D'où le questionnement : les nombreux emprunts qui émaillent la série sont-ils plus importants et profonds que les clins d'oeil érudits reproduits ?


Affiche (japonaise) d'Il Etait Une Fois Dans l'Ouest et vignette extraite
d'Une raison Pour Mourir (tome 8)
Mon sentiment est que Swolf se fait plaisir en dessinant un genre abandonné par le cinéma dont il connaît parfaitement les codes et les stéréotypes. Un point qu'il a d'ailleurs développé  dans une interview menée par Auracan à l'occasion de la sortie du tome 14 en 2006 : "« Le personnage va rester celui qu'on a toujours suivi. C'est plutôt le monde autour de lui qui évoluera de manière différente. Il est certain que je ne peux plus écrire des histoires aussi simplistes que celles des débuts de la série. Il y aura des nœuds un peu plus difficiles à défaire. Les protagonistes auront plus de nuances psychologiques. Mais, malgré tout, il y a des codes à respecter et il y a des éléments que le public et moi-même aimons retrouver. On restera donc dans la continuité, tout en essayant de proposer de nouvelles intrigues intéressantes. »
Ses premières histoires sont certes linéaires et très classiques mais elles sont efficaces, épurées et équilibrées. Des qualités parfois perdues dans les albums ultérieurs dont certaines planches souffre d'une surcharge de texte. 



Le Grand Silence est assurément le film dans lequel la série Durango puise ses racines. Swolf y fait d'ailleurs plusieurs fois allusion à travers des mises en abîme emblématiques.  Dans le premier tome, une tombe apparaît au premier plan. Son occupant porte le nom de Silence. Il s'agit du personnage joué par   Trintignan, muet en raison d'un égorgement réalisé à la va-vite, et qui se fait abattre avant d'avoir pu "nettoyer" la ville. Sous cet éclairage, Durango apparaît donc comme son frère jumeau, tendance Clint Eastwood, venu sur les lieux du tournage finir le travail. 
Puis, dans le troisième tome, le tueur de papier estropié récupère le Mauser de Silence pour se lancer dans une intrigue très proche de celle d'Il Etait Une Fois Dans l'Ouest. Entre temps, il se sera remis de ses blessures dans le très sanglant Les Forces De La Colère. Trois beaux albums servis par des dessins qui résistent bien à l'épreuve du temps.




Les membres du forum westermovies ont référencé les sources d'inspiration d'Yves Swolf dans leur discussion Quand Durango s'inspire de la BD. Un processus dont l'auteur a aussi eu recours pour Le Prince De La Nuit où il met notamment en scène Jean Gabin. Un point certainement abordé et discuté dans le numéro 18 de dBD mais je ne l'ai pas sous la main.


Sylvain

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