27 oct. 2012

Les Univers de Stefan Wul - OMS en série - Tome 1

De J.D. Morvan et M. Hawthorne
Adaptation en 2 tomes du roman de Stephan Wul

Les humains considérés comme des animaux de compagnie, une accroche particulièrement bien exploitée dans ce récit d'anticipation. Un voyage de 48 pages assuré par un graphisme à la fois froid et généreux qui parvient à trouver le juste équilibre entre les racines "vintages" de l'intrigue et sa nécessaire modernisation. Une belle performance d'autant plus appréciable qu'elle s'appuie sur un scénario qui ne laisse pas l'émotion sur le bord du chemin de l'efficacité. 

Un diptyque très bien lancé et mis sur rails. Il serait très étonnant de ne le voir arriver à bon port. 


Un cran au-dessus de Niourk, cet album finit d'installer la nouvelle collection d'Ankama. Une des bonnes surprises de la rentrée. 

Sylvain

22 oct. 2012

Une vie chinoise, un éblouissant triptyque


De P Ôtié et LI Kunwu
3 tomes - Noir et Blanc
Dargaud Lombard 

Eblouissant triptyque que ce récit d’une vie. 
Le  temps du père, le temps du parti, le temps de l’argent. 700 et quelques pages fulgurantes, 700 planches porteuses de larmes... Le trait noir magnifique, rugueux comme l’époque, l’encre des dazibao, prolongements dramatiques de la calligraphie ancestrale. La plume est dure, hachée comme la vie de LI, mais soudain adoucie, si douce, lorsque la femme surgit. Ebloui par l’immense labeur de ces milliers de cases fouillées, terrifiantes parfois, réalistes souvent, magnifiques toujours. 
Mais aussi incroyable auto-analyse d’une vie difficile, perdue, sauvage, affamée, soumise, castrée d’amour, comme les centaines de millions d’autres.

Ce n’est pas une B.D, c’est un divan analytique et un superbe livre d’histoire où alors B.D prend là quelque sens de Biographie Désespérée. Quelques 40 ans d’errances, nées avec l’irruption de Mao, pauvreté, ignorance, Mao qui soudain redonne semblance d’énergie à un pays en pleine errance. Période d’un système qui secoue le wagon, fenêtres fermées,  pour faire croire aux occupants qu’il avance. Puis soldat, amour en friche, Armée de Libération du Peuple, talent de dessinateur utilisé à condition que…ce qui conduit naturellement au parti et aux pleurs de 76 quand Papa Mao casse sa pipe et garde ses dents jaunes pour l’éternité. Orphelinat général.
Puis, bing, arrive papa Deng Xiao Ping et son allégorie du chat et de la souris, qui ouvre grand les portes au fric, du business effréné, combines à gogo, gigantesque Monopoly, perdu, déboussolé l’ami LI, comme tous….



Pour qui a eu la chance et le bonheur, comme moi, de vivre quelques 7 ans en Chine, aimé profondément ce pays, lu son histoire avec frénésie, ce livre est d’une parfaite honnêteté, d’un réalisme profond, d’accouchement sans doute difficile mais accomplie de talent graphique. 
Trajectoire d’une vie ou survie  par talent ? Je penche pour la dernière option, le Peuple Chinois n’ayant eu ni mot, ni nourriture  pendant si longtemps, entre autre lors du célèbre « Bond en Avant » de 58 à 62, générateur de 30 millions de morts par famine.
Bref, magnifique livre d’histoire, homme et pays confondus, à donner et consommer sans modération. A donner à nombre de ma génération, les lécheurs fessiers du système Mao des années 60-70 qui ont avalés et propagés les mensonges comme Gide avait avalé ceux du Staline. Les noms abondent, Sartre et la Beauvoir-Castor en étant figures de proue, mais il en reste encore tant, hébergés par la Presse écrite parisienne. Ceux là même qui étalaient des dizaines de mètres de tréteaux à l’Université, exposant les grandioses réalisations Chinoises, les « œuvres  impérissables » de Mao et de Jiangqing, « Mme Mao », dite « pomme bleue », « liang ping » dans les bordels Shanghaiens des années 30, terrifiante horreur faite femme, dont l’arrestation à Pékin, déclencha joie populaire de longue durée…



Merci (Xie Xie en Chinois) de ces 3 beaux livres, aux auteurs d’abord et aux amis qui me les ont offerts. Il m’arrive quelquefois, le soir, avant que les paupières ne s’affaissent, de rester sur une planche, et rêver. Cela me semble le plus simple hommage à faire à l’immense et magnifique œuvre auto-bio-graphique de LI Kunwu, 3 mots clés pour 3 tomes, d’un honnête homme du Yunnan, talentueux dessinateur, fétu de paille balloté dans la tourmente d’un pays qui revenait de très loin, pays enfant d’un passé douloureux, aujourd’hui adolescent au développement autant prometteur que difficile. Mais comment ne pas davantage aimer la Chine et surtout son peuple, quand on sait d’où tous reviennent ? LI Kunwu l’illustre à la perfection.

Didier

Les trois tomes d'Une vie chinoise sont aussi disponibles en numérique sur IZNEO. 









21 oct. 2012

Rentrée 2012 - Déceptions en rafale et quelques bonnes prises

Bédérama poursuit la chasse à la mitraillette, méthode plus coûteuse que destructrice et qui s'avère surtout assez improductive cette saison : le bilan est bien maigre et compte peu de bonnes (sur)prises.

Au rayon petit gibier, on peut trouver :
  • Blogosphère (Bastien Vivès) : soit l'effet de surprise est passé soit le sujet (le petit monde des Blogs BD) est trop pointu pour parler aux non initiés. Toujours est-il que ce quatrième tome commence à ressembler à celui de trop.
  • Superior (Mark Millar) : un hommage revisité de deux mythes (Superman et Faust) mixés avec le concept d'Incassable. Du boulot bien réalisé. Sans plus.
  • Fables (Bill Willingham) : déception ! Après un quinzième tome tonitruant, le seizième lâche la trame principale pour un cross-over compliqué avec le tome 6 de la série Jack of Fables. Pour les inconditionnels uniquement.
  • Tony Chu - Tome 4 (John Layman) : là encore, la déception est d'autant plus grande que l'attente était forte suite aux trois premiers tomes vraiment très bons et surprenants. De petites histoires juste sympathiques qui ne font guère avancer l'intrigue principale.
  • Alter Ego Ultimatum (Renders) : un septième tome qui conclut proprement la saison 1 mais qui aurait été plus pertinent (plus apprécié du moins) s'il avait été publié dans la foulée des 6 précédents.  Pourquoi attendre un an pour ce dernier opus alors que les autres sont sortis avec deux mois d'écart ?
  • Largo Winch tome 18 (J. Van Hamme) : une grande catastrophe. Autant regarder un épisode de Mimi Mathy sur TF1 plutôt que d'acheter ce mélo insipide à la narration répétitive. Seul avantage, il n'y a pas de spots publicitaires.
Parmi les pièces plus copieuses, on peut lire : 
  • Alix sénator (V. Mangin) : très beaux dessins et scénario sérieux. Le tout est classique et manque cependant d'un peu de peps'.
  • Highlands (Philippe Aymond) : du classique très bien fait et rythmé. Un agréable moment de lecture parfois légèrement perturbé par des dialogues scolaires.
  • Billy Bat tome 4 (Naoki Urasawa) : Curieux et complexe manga qui mêle éléments historiques, dimension fantastique, références à Mickey Mouse, .... Rien à dire sur le fond comme sur la forme ... sauf qu'on a du mal à se passionner pour cette histoire complexe. L'expérience un peu décevante de Monster pousse en effet à être circonspect.
  • Niourk (Olivier Vatine) : après s'être purgé avec Cixi de Troy, Vatine renoue avec un récit de qualité. Un première partie de diptyque qui donne envie de lire la suite et même de suivre cette nouvelle collection dédiée à Stefan Wul.
  • Toxic tome 2 (Charles Burns) : à défaut de comprendre quoi que se soit, on se laisse entraîner dans des univers aussi dérangeants les uns que les autres. Plus captivant que la première partie.

Le meilleur pour la fin, le sixième tome de Scalped (Jason Aaron et RM Guéra), un polar de plus en plus noir et violent mais qui reste d'une solidité et d'une intensité rare. Impressionnant.








Sylvain

15 oct. 2012

Little Nemo in GOOGLE-Land

La homepage de Google est actuellement dédiée à Winsor McCay, le créateur de Little Nemo. Une très belle doodle page, intéractive et pleine de poésie. A tester sur google !

Sylvain


14 oct. 2012

Jim Curious, un beau livre plein de relief

Livre en vision 3D - Noir et Blanc
Edition 2024

Un beau livre fourni avec deux paires de lunettes 3D. Une bonne idée qui permet de partager très agréablement un moment de lecture en simultané.
Les belles illustrations s'enchaînent et plongent les lecteurs dans un monde aquatique à la profondeur fascinante. Certaines pages, vraiment superbes, poussent à la rèverie. Une réussite graphique qui n'est cependant pas servie par un quelconque scénario. Certes la dimension poétique est au rendez-vous mais on aimerait un peu plus de consistance et on se dit que Le démon des glaces en 3D, ça le ferait drôlement. 


Une expérience qui mérite néanmoins d'être vécue.   

Sylvain

13 oct. 2012

Le Dramaturge

De Daren White et Eddie Campbell
One shot - Couleur
Editions Cà et Là


Le dramaturge est un écrivain dont la reconnaissance professionnelle est inversement proportionnelle au vide de sa vie personnelle. 

Avec une intelligence rare, qui se traduit notamment par un jeu de ping pong sophistiqué entre le texte et les illustrations, les auteurs donnent vie un personnage aussi antipathique que pathétique. Pour autant, le faux détachement employé ainsi que le second degré maîtrisé permettent de pousser très loin l'intrusion dans son intimité ce qui finit par lui donner une humanité inattendue. 

Un bel objet servant d'écrin à une oeuvre originale et forte. Un bon conseil de lecture provenant de la libairie Nouvelle d'Asnières.


Sylvain

6 oct. 2012

Dessous

De Leela Corman
Noir et Blanc - 200 pages
Editions Cà et Là


Dessous est de ces livres formellement imparfait qui vous emporte grâce à son supplément d'âme. Énergie et générosité font passer pour quantités négligeables les petits égarements du scénario ainsi que certaines approximations graphiques. La dernière page tournée, il ne reste que le parcours gorgé d'humanité de ces femmes dans le quartier juif du New York de 1900. Il y a du Chaim Potok dans cette BD. Un peu mais c'est déjà beaucoup.
Une première BD ambitieuse et un des coups de coeur de la rentrée.





Sylvain

4 oct. 2012

Nous3, où l'intérêt que peuvent avoir les rééditions


C'est grâce à la réédition par Urban Comics du catalogue de DC que j'ai découvert ce one shot, qui mérite le détour.  Nous3, traduction (inutile à mon avis) de "We3" narre l´histoire de trois animaux de compagnie, un chien, un chat et un lapin, enlevés par le gouvernement pour en faire des armes absolues suréquipées d'armures de combat à faire pâlir d'envie Robocop.  Suite à la décision de l'armée d'abandonner le projet et de faire disparaître "les preuves", la scientifique en charge de ces bébètes désobéit et leur rend leur liberté. Et c'est là que les ennuis commencent. 
Si l'intrigue est assez classique, elle permet néanmoins au scénariste Grant Morrison de construire une histoire très centrée sur l'action, avec de très astucieux dialogues minimalistes entre les animaux, égrainant de ci de là quelques idées malgré tout un peu simplistes (faut pas faire de mal  aux animaux, les hommes sont vraiment des méchants,...). La claque vient donc du dessin de Frank Quitely qui surprend par des compositions très originales et vraiment réussies. 
Même si l'ultraviolence m'a un peu gênée (les auteurs jouent sur le contraste avec le côté "mimi" des petits animaux), Nous3 est un one shot vraiment prenant et très agréable à lire. A tel point que j'aurais aimé en lire davantage. 
A découvrir si ce n'est pas encore fait.




Lorenzo

2 oct. 2012

Les sentiments du prince Charles

De Liv Strömquist
136 pages - Noir et blanc
Editions Rackham

Liv Strömquist utilise avec talent les possibilités du neuvième art pour illustrer son propos sur l'amour et les relations homme/femme. Au détail près de son trait naif et parfois trop chargé, la qualité de l'oeuvre rappelle un peu celles de  Scott McCloud : le texte très présent est accompagné d'éléments graphiques impactants et variés (dessins, photos, collages, ...) qui viennent éclairer la pensée. Une belle découverte, brillante, érudite, drôle et interpellante.

Origines des conventions, propriété du corps, humour machiste, ... le livre prend position en décryptant des cas concrets de séries, de chansons et d'actualités people tout en s'appuyant sur des éléments historiques et une bibliographie conséquente. Sa force tient dans ses prises de position nettes, la rigueur du raisonnement et un second degré omniprésent. L'ensemble est brillant et pousse à la réflexion. Vraiment une belle performance qui devrait certainement retenir l'attention du prix Artemisia.




Sylvain